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jeudi 31 octobre 2019

homélie de la fête de la Toussaint

La semaine dernière en marchant dans la rue, j’entends une dame qui disait à un monsieur qui venait de l’aider à fermer son parapluie récalcitrant, « Grazié millé ». J’ai trouvé cette expression très belle, surtout quelle était dite avec un large sourire et en dit  plus long que notre simple merci français ou merci beaucoup,  « Moutcha gracias » en espagnol.
La grâce est  un don gratuit, un don de bonté ; En Dieu elle est la faveur, le secours gratuit qu’il nous donne pour répondre à son appel: devenir enfants de Dieu, fils adoptifs, participants de la divine nature, de la vie éternelle (cf. Jn 17,3).
  La grâce est une participation à la vie de Dieu, elle nous introduit dans l'intimité de la vie trinitaire, de la vie en Dieu: Par le Baptême le chrétien participe à la grâce du Christ,
nous dit le catéchisme de l’Eglise Catholique.
Alors quel est c’est être que nous sommes capable de donner mille grâces pour un petit service.
Si c’était cela un saint, tout simplement donner une surabondance de grâces, une surabondance de bonnes choses. Oui nous en sommes capables, alors osons le faire.
Quels sont donc nos sentiments en cette fête de Tous les Saints ? Joie de célébrer la sainteté de tant de nos frères et sœurs, tristesse de ne pas encore être ce que nous sommes appelés à devenir ? Saint Jean, dans la 2e lecture nous dévoile cet horizon entre espérance et frustration : « dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. » La vie chrétienne est toujours un entre-deux : entre le don déjà fait par Dieu de sa sainteté, et le temps qu’il nous faut pour répondre à cette sainteté, et en être témoins auprès de nos frères. Mais en quoi consiste exactement la sainteté ?
De nouveau, saint Jean nous met sur la piste : être saint, c’est vivre en profondeur de notre identité d’enfants de Dieu. Plus nous nous exercerons à vivre de cette identité dès maintenant, plus nous serons prêts pour le grand passage qui nous placera dans la vie de ressuscités. Alors « nous serons semblables à Dieu car nous le verrons tel qu’il est. »
Nous deviendrons en effet pleinement ce que nous avons cherché à être, les enfants du Père. Nous verrons Dieu dans son Fils et tout ce que nous contemplerons s’imprimera en nous : nous deviendrons enfants de Dieu par le Fils dans la lumière de l’Esprit. Voilà la sainteté promise : vivre la vie même de Dieu par et avec Jésus.
Tel est le terme de notre route et nous avons bien besoin d’une vie pour nous y préparer. Apprendre un peu plus chaque jour à vivre en enfants de Dieu. Cette compréhension de la sainteté n’est pas théorique mais incarnée : elle ne se comprend qu’en méditant la vie de Jésus. La sainteté n’est pas une perfection morale inatteignable et désespérante ; c’est la participation à la vie même de Jésus dès aujourd’hui. Dieu seul est saint et seul Jésus est appelé dans les évangiles le « Saint de Dieu » (Mc 1,24). Et pourquoi Jésus est-il saint ? Parce qu’il est le Fils de Dieu, parce que toute sa vie ne se comprend que dans cette identité qui informe ses sentiments, ses pensées et son agir. 

Il n’y a rien dans l’humanité de Jésus qui échappe à son être de fils. Absolument rien. Jésus se reçoit totalement de Dieu et fait passer tout ce qu’il vit de joyeux et de douloureux dans sa relation au Père, dans leur Esprit commun. Il n’y a pas un moment de sa vie où le Christ met sa relation au Père entre parenthèses pour vivre une vie indépendante et faire enfin ce qui lui passe par la tête, comme nous le faisons en voulant exprimer notre indépendance. Quelle unité avons-nous entre notre démarche de venir à la messe aujourd’hui et la vie à la maison ou au travail. La sainteté à laquelle nous sommes tous appelés, c’est de vivre de la vie même de Dieu en Jésus, donc de vivre en enfants de Dieu comme lui là où nous trouvons, maintenant à la messe et tout à l’heure à la maison, dans une attitude différente certes, mais dans le même esprit.
Comme Jésus : il s’agit bien d’accueillir l’Esprit Saint. Pas d’autre chemin vers la sainteté. Tous les saints canonisés le sont en tant qu’ils sont des reflets de l’Esprit Saint qui habite en eux, dans la diversité de leurs appels, de leurs histoires et de leurs personnalités. Chacun d’eux témoigne avec ses propres couleurs de l’unique lumière du Christ, lumière du monde. Il en est de même pour tous les autres saints dont la vie est cachée : leur vie est toute filiale, toute emplie des sentiments du Fils.
Notre sainteté est une invention à faire ; elle est à créer chaque jour par le don de l’Esprit car seuls « ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu sont enfants de Dieu. » (Rm 8,14) Plus nous apprenons à connaître Jésus, plus nous découvrons notre propre mystère, notre identité cachée. Seul le Fils Unique nous aide à devenirs aussi des enfants uniques du Père, des êtres qui ont découvert la liberté des enfants de Dieu, capables d’ouvrir de nouveaux chemins de sainteté à chaque époque. Cette sainteté est bien une vie pleinement humaine mais qui est vécue au sein de la Trinité sainte ; c’est une communion fraternelle avec Jésus et entre nous qui nous dévoile le visage de notre Père et nous aide à nous laisser guider par l’Esprit d’amour. La vie divine nous humanise ! Si les béatitudes nous sont données en ce jour de la Toussaint, ce n’est pas comme un programme moral au-dessus de nos forces. C’est un portrait, celui de Jésus, pauvre de cœur, affligé, doux, affamé de justice, miséricordieux, au cœur pur, artisan de paix, persécuté pour la justice. Tel est le portrait du Fils qui nous est proposé pour qu’il devienne le nôtre, non par notre propre force mais par le don de l’Esprit qui fera en nous beaucoup plus que ce que nous pouvons imaginer.
Devenir saint est impossible tout seul car cela ne se réalise que par le Christ et en lui. Cela passe par notre engagement concret pour nous approcher de lui dans la prière, pour le connaître dans les Ecritures, pour nous inspirer de sa vie comme tous ceux qui nous ont précédés. Moins nous fréquentons Jésus, plus nous avons une idée déformée de la sainteté, avec des accents moralisateurs  ; nous deviendrons alors des pharisiens ou des désespérés de la sainteté. Mais si nous nous mettons à l’école du bon Jésus, nous marcherons sur un chemin de miséricorde car le Cœur du Fils est miséricordieux ; la sainteté partagée au sein de la Trinité, c’est leur Amour miséricordieux qui se déverse sur tous ceux qui n’ont pas peur de le demander et de l’accueillir ; sur tous ceux qui entrevoient la sainteté non comme une possession mais comme une grande pauvreté capable d’accueillir et de donner sans rien calculer. La joie de Dieu est celle des pauvres, ceux qui n’ont que Lui mais qui justement ont compris que Dieu seul suffit pour combler une vie. Puisse cette joie des saints devenir aussi la nôtre. Amen.
De diverses sources

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